C'était vrai hier, cela semble l'être d'autant plus aujourd'hui : les corps indépendants des métiers du doublage se livrent, tant bien que mal, à la défense de leurs conditions de travail et de leur rémunération. Les détecteur.ices ont enfin obtenu une augmentation, la concrétisation de la réflexion des directeur.ices artistiques et comédien.nes de doublage sur leurs propres tarifs est en cours et le Collectif Doublage avait déjà lancé la machine pour les auteur.ices travaillant avec Dubbing Brothers.
Maintenant, plusieurs questions se posent, dont celles-ci : peut-on/doit-on faire front en tant que profession des métiers de l'adaptation audiovisuelle et profiter de cette vague d’augmentation en demandant une revalorisation totale des budgets auprès des sociétés de post-production ? Et surtout, comment faire ?
La demande des détecteur.ices était une chose (1 € supplémentaire la minute, c'était un minimum), mais celle, plus conséquente, des comédien.nes et DA pousse les auteurs à se poser sérieusement la question de leurs tarifs. Les budgets doublage étant majoritairement alloués aux artistes-interprètes et aux DA, ils pourraient sous peu être considérablement revus à la hausse. Quand il est tout à fait normal que leur rémunération soit revalorisée alors que les tâches annexes se multiplient et que, tout simplement, le coût de la vie dans notre pays augmente, les auteur.ices-adaptateur.ices, par définition en bout de chaîne et invisibles, sont en droit de s’interroger : vont-iels se voir refuser toute augmentation dans les années à venir, voire subiront-iels une baisse de leurs tarifs en compensation ? Car si évidemment, une baisse en fâcherait plus d'un.e, la constance de ces mêmes tarifs d’une année sur l’autre revient à accepter d'être graduellement moins rémunéré. Au même titre que les professions susmentionnées, c'est pourtant un fait accepté depuis bien longtemps par les auteur.ices, parfois sans s’en rendre compte et souvent à contrecœur. De plus, cette baisse de leur niveau de vie tend à empirer avec l'avènement des plateformes qui n'offrent pas, ou peu, de droits de diffusion pour venir compenser cette stagnation.
Idéalement, nous pourrions commencer à agir avant la fin des négociations, afin que nos clients soient moins réfractaires à demander une nouvelle augmentation de budget auprès des leurs. Si une action collective auprès de tous nos clients semble difficilement envisageable (et en même temps, pourquoi pas ?), c'est à nous d'assumer la renégociation, en tant qu'individus. Certaines équipes de doublage ont déjà entamé des démarches collectives sur leurs séries, parfois sous menace de quitter le projet si les tarifs n’étaient pas réévalués. Mais il arrive aussi qu'au sein d’une équipe, tout le monde ne voie pas les choses du même œil. Évidemment, nous ne sommes pas toustes dans la même situation, nous n'avons pas toustes la même expérience, nos craintes ne sont donc pas les mêmes. Malgré tout, il faut rester convaincu que l'union fait la force. En effet, il n'est finalement pas si facile pour une société de trouver tout une nouvelle équipe d'auteur.ices du jour au lendemain, d'autant plus quand les programmes audiovisuels sont devenus légion et que les disponibilités immédiates de toustes se sont restreintes.
Pour finir, cette situation doit concerner directement tous les métiers de la traduction audiovisuelle et pas uniquement l’enveloppe allouée au doublage. Si ces demandes de revalorisation aboutissent, il n'y a aucune raison qu'elles ne soient pas généralisées à l'ensemble des professions de l’adaptation audiovisuelle en permettant aux professionnel.les du sous-titrage et de la voice-over de vivre iels-aussi dignement de leur métier.
Une chose est certaine, il n'y a que nous qui puissions changer les choses, individuellement et collectivement. Les sociétés de post-production sont nos clientes, nous ne sommes pas leurs employé.es. Elles ont besoin de nous pour tourner et sans notre travail, la chaîne est tout simplement rompue.
Pour rappel, les tarifs préconisés par le SNAC et les associations professionnelles sont les suivants :
Doublage cinéma : 44€ la minute
Doublage autres exploitations : 33€ la minute
Sous-titrage cinéma : 4€30 le sous-titre
Sous-titrage autres exploitations : 3€50 le sous-titre
Voice over toutes exploitations : 40€ le feuillet