IAG et traduction - la post-édition

Attention, danger !

Les machines, ces outils initialement conçus pour faciliter nos travaux divers, vous connaissez ? On prédit depuis déjà longtemps qu'elles vont nous remplacer, entretenant une vaste supercherie. Leurs plus fervents défenseurs reconnaissent pourtant l'imperfection des productions issues de machines. Et l’ATAA, comme ses adhérents, reçoit de plus en plus souvent des questions et des propositions autour de la post-édition. Si vous ne savez pas bien ce que c’est, c’est normal, car ce terme est l’exemple même d’une mauvaise traduction.

Issue de l’anglais “post-edit”, cette pratique consiste à retravailler une sortie machine pour que le texte ainsi transposé (on ne peut plus vraiment parler ici ni de traduction ni d’adaptation) d’une langue à une autre retrouve la forme et les caractéristiques d’une traduction ou d’une adaptation réalisée par un humain. Cette pratique, fondée sur une vision chimérique et statistique de la traduction (un mot ou un groupe de mots en langue A = un mot ou un groupe de mots en langue B), emporte plusieurs risques majeurs.

La multiplication de textes et documents issus de machines et plus ou moins améliorés par des humains mène (déjà !) à une standardisation et à un appauvrissement de nos langues et de nos pensées.

Clients et même traducteurs pourraient croire que le travail ainsi réalisé, à résultat égal, serait fait plus vite et plus facilement. Comme si travailler avec un super dictionnaire démultipliait comme par magie nos pouvoirs d'adaptation, de choix, d’ajustements, de compromis, de style, de registre… Nos confrères traducteurs littéraires ont mené une grande enquête sur les pratiques de post-édition. Surprise ! Elle fait ressortir que le travail de post-édition prend a minima le même temps qu’une traduction classique, qu’il est beaucoup plus difficile et moins intéressant. Comme de rattraper une mayonnaise mal partie (voir à ce sujet la formidable intervention d’Estelle Renard à l’occasion des 40 ans de la SCAM, c’est à 42 minutes). Il ne faut donc EN AUCUN CAS se laisser aller à la tentation d’accepter des tarifs ou des délais réduits pour de tels travaux.

Le travail de post-édition n’est pas clairement ni systématiquement reconnu comme travail d’auteur, seul type de travail permettant

- la rémunération en note de droits d’auteur (par opposition à l’émission de factures),

- le bénéfice du statut fiscal et social d’auteur,

- et la perception de droits d’auteurs.

Les travaux de post-édition servent à alimenter et à faire progresser les outils d’IAG, déjà développés à partir des œuvres humaines existantes, à titre TOTALEMENT GRACIEUX, permettant la reproduction à l’infini des trois risques précédents. Le traitement de ces données reste dépendant d’un travail humain colossal et invisibilisé, souvent exercé dans des conditions déplorables, sous-payé, déshumanisant, voire traumatisant (quand il s’agit de modération de contenus). Le stockage des données nécessaires au fonctionnement et à l’entraînement des algorithmes produit une empreinte écologique catastrophique.

C'est pourquoi l'ATAA engage tous les traducteurs à

- ne pas accepter de travaux de post-édition

- ne pas utiliser d'outils d'IAG

- renforcer leur vigilance et porter à la connaissance des associations professionnelles, syndicats ou organisations tout élément pertinent pour la défense de la création et la traduction humaines.

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