Dans un contexte d’évolution technologique rapide, sur laquelle les auteur(e)s ont très peu prise, l’ATAA estime utile d’inviter ses adhérents à réfléchir sur nos rapports avec les éditeurs de logiciels.
Tout comme les prestataires techniques auxquels nous avons affaire dans le cadre de notre activité, les éditeurs de logiciels destinés au sous-titrage ou au doublage poursuivent des objectifs commerciaux. Au-delà des différents discours visant à faire la promotion de leurs produits, il nous semble d’abord important de garder à l’esprit le fait que ces sociétés travaillent avec l’objectif exclusif de réaliser des profits.
Il peut parfois sembler que les intérêts économiques de ces sociétés et ceux des auteurs convergent, notamment à travers le développement de nouveaux outils présentés comme facilitant notre travail. Néanmoins, l’ATAA rappelle que ces nouveaux outils sont développés, certes parfois en concertation avec des auteur(e)s, mais aussi, et cette fois systématiquement, en concertation avec les prestataires techniques, dont le seul objectif est également de maximiser les profits en réduisant les coûts.
Ainsi, il n’aura échappé à personne que les logiciels de doublage, au-delà de leur utilité et de leur efficacité objectives, ont permis aux prestataires d’obliger certains auteurs à effectuer leur détection, souvent au mépris du droit du travail, lorsque les tâches techniques sont rémunérées en droits d’auteur. De même, des postes comme la calligraphie ont été totalement supprimés. Plus globalement, les tentatives d’automatisation de certains aspects de notre travail tendent à faire oublier qu’il est avant tout intellectuel et créatif, et à justifier de nouvelles pressions sur les tarifs.
Il ne s’agit pas ici de remettre en cause la numérisation de notre chaîne de travail, ce qui serait absurde, mais de rappeler que la création de nouveaux outils a des conséquences concrètes, difficiles à prévoir et irréversibles sur les conditions de travail de l’ensemble de la profession. Et l’histoire montre que ces conséquences sont loin d’être toutes positives, pour la raison simple que ces outils ne sont pas développés dans l’intérêt de la communauté des auteurs, ou de la qualité des adaptations, mais avec l’objectif de générer des profits pour les éditeurs, en vendant des logiciels, et pour les prestataires, en permettant de réduire les coûts.
Les auteur(e)s ont bien sûr toute légitimité à participer, de manière bénévole ou non, au développement de logiciels. Cependant, en tant que représentante de la profession, l’Ataa estime que de telles collaborations doivent se faire en pleine conscience des réalités rappelées ici, et en gardant également à l’esprit que les éditeurs sont en concurrence, souvent féroce, les uns avec les autres. Il semble enfin essentiel de prendre en compte les risques juridiques liés à l’utilisation de tels outils, notamment au regard du droit du travail (problème du mode de rémunération des détections et repérages, qui ne relèvent pas du droit d’auteur, par exemple). Ainsi, au-delà des bénéfices immédiats et individuels que peuvent représenter de telles collaborations, il nous semble essentiel de considérer le long terme et l’ensemble de la profession avant de répondre aux sollicitations de sociétés privées dont les objectifs et les intérêts, légitimes ou non, ne sont pas les nôtres.
L’ATAA, qui maintient depuis sa création la plus stricte neutralité vis-à-vis des prestataires et des éditeurs, reste à la disposition des adhérents qui souhaitent explorer plus avant ces questions ou qui désireraient savoir comment réagir aux sollicitations des éditeurs.