Lenny Borger, translating to love more

By Nadia Meflah. Interview conducted in Paris, January 2020

Copyright, Nadia Melfah
“A film is like a novel: you have to translate it for each new generation” Lenny Borger

When Lenny Borger arrived in Paris in the mid-1970s, this young New Yorker from Brooklyn brought with him a love of the French language.

This language, so foreign to him, enchanted his ears when, as a young boy, he discovered, almost in real time, the songs of Jean Ferrat, Léo Ferré and Jacques Brel. The rhythm, like the poetry of the lyrics, would have a lasting effect on him.

It was this unique love that led him to leave the United States for France. And what does an American do in Paris when he also loves the movies? In addition to becoming a frequent moviegoer and visitor to the Cinémathèque française, Lenny became a film critic for Variety, the leading American entertainment newspaper, a position he held until the early 1990s. But translating French films really allowed his mastery and knowledge of the subtleties of the language of both Molière and Shakespeare to shine.

In 1980, Bertrand Tavernier asked him to subtitle his film Une semaine de vacances, starring Nathalie Baye and Gérard Lanvin. It was the start of a long career during which Lenny Borger would translate over a hundred French films into English, with a particular predilection for the cinema of the interwar period. Marcel Carné, Jean Renoir, Julien Duvivier, Henri-Georges Clouzot, Robert Bresson, Georges Franju, Luis Buñuel, but also Jean-Pierre Melville, Claude Chabrol, Jean-Luc Godard, Claude Sautet, Patrick Chéreau, among many others.

Welcoming us into his Parisian apartment next door to the Grand Rex, Lenny recalls his work with words and how it served French cinema.

At the start of 2020, the Cinémathèque française paid tribute to Jean-Luc Godard. You've worked with him and translated some of his films. Which ones?

In the 2000s, Criterion asked me to translate Jean-Luc Godard's classic period, the films of the 1960s. À bout de Souffle was a gem for any translator, as it's a film with an enormous number of puns, some of them very funny. In fact, I'd found a linguistic trick in English for the phrase: “T'es vraiment dégueulasse” / “You make me puke”. When I did the translation, I looked at what had been done before. It has to be said that not everything was well translated, it was much more succinct, we didn't really try to convey the flavor of the dialogue, it was still quite literal.

And then, how can we fail to mention one of the worst puns in his entire filmography, with his film Une femme est une femme (1961)? Anna Karina's last line gave me a hard time. Jean Claude Brialy and Anna Karina are in bed together, and he says to her: “Angela, you're infamous”, to which she replies: “Me? I'm not infamous, I'm a woman”. I found the equivalent in English: he says “Damn you, Angela!” She replies: “No, a dame me”.

When the film was to be re-released in America, I worked alone on it. It was at the Malakoff studio. I remember that Jean-Luc Godard's sister was present in the lab when I wrote that last sentence. I had asked her to come, as I was having translation problems. Much later, Anne-Marie Miéville, with whom I'd had the opportunity to work while working on his films, recommended that I work with him again on Éloge de l'amour.

My colleague Cynthia Schoch and I translated the film, which is a bit of an oddity. It went perfectly. He invited us to see the film at his home in Switzerland. I remember I was a bit grumpy. I didn't want to travel so far for a job I'd be doing in the Paris region anyway. Nevertheless, we took the train to Lausanne, and then a bus to Rolle. He made us feel very welcome and was very friendly, as was Anne-Marie Miéville. It was quite a funny experience. The day after the Cannes premiere in May 2001, he called to tell me how pleased he was with the subtitles. I think I should have stopped there, because after that it got a bit more complicated. With Notre musique, everything became a little more complex, with several languages to translate. But above all, he didn't want everything to be translated.

Lenny Borger, traduire pour aimer davantage

Par Nadia Meflah. Entretien réalisé à Paris, en janvier 2020, avec la collaboration de Glenn Myrent. Publié suite à la disparition de Lenny Borger, le 23 décembre 2024.

Copyright, Nadia Melfah
« Un film est comme un roman, il faut le traduire à chaque nouvelle génération » Lenny Borger

Lorsque Lenny Borger débarque à Paris au milieu des années 1970, ce jeune New-Yorkais de Brooklyn porte déjà en lui l’amour de la langue française.

Cette langue, si étrangère, enchante ses oreilles lorsque, jeune adolescent, il découvre, quasi en direct, les textes chantés de Jean Ferrat, Léo Ferré ou de Jacques Brel. Le rythme, comme la poésie des paroles, vont durablement s’inscrire en lui.

C’est cet amour, unique, qui l’amènera à quitter les États-Unis pour la France. Et que fait un Américain à Paris lorsqu’il aime aussi le cinéma ? Outre fréquenter la Cinémathèque française et les salles obscures, Lenny devient alors critique pour le journal américain de référence, Variety, poste qu’il occupera jusqu’au début des années 1990. Mais plus que l’activité journalistique, c’est véritablement dans la traduction des films français qu'il saura déployer toute sa maîtrise et connaissance des subtilités de la langue de Molière comme celle de Shakespeare.

En 1980, Bertrand Tavernier lui propose de faire le sous-titrage de son film Une semaine de vacances avec Nathalie Baye et Gérard Lanvin. C’est le début d’une longue carrière, au cours de laquelle Lenny Borger traduira en anglais plus d’une centaine de films français, avec une prédilection pour le cinéma de l’entre-deux-guerres. Marcel Carné, Jean Renoir, Julien Duvivier, Henri-Georges Clouzot, Robert Bresson, Georges Franju, Luis Buñuel, mais aussi Jean-Pierre Melville, Claude Chabrol, Jean-Luc Godard, Claude Sautet, Patrick Chéreau, parmi tant d’autres.

Nous recevant chez lui, dans son appartement parisien mitoyen du Grand Rex, Lenny égrène quelques souvenirs de son travail des mots au service du cinéma.

En ce début d’année 2020, la Cinémathèque française rend hommage à Jean-Luc Godard. Vous avez traduit certains de ses films et même travaillé avec lui. Pour quels films ?

Dans les années 2000, Criterion m’avait demandé de traduire la période classique de Jean-Luc Godard, les films des années 1960. À bout de Souffle était un bijou pour tout traducteur, c’est un film qui comporte énormément de jeux de mots, certains très marrants. J’avais d’ailleurs trouvé une astuce linguistique en anglais pour la phrase : « T’es vraiment dégueulasse » / « You make me puke ». Quand j’ai fait ce travail de traduction, j’avais regardé ce qui avait été fait avant. Il faut préciser que tout n’était pas vraiment bien traduit, c’était bien plus succinct, on ne cherchait pas vraiment à transmettre la saveur du dialogue, ça restait tout de même assez littéral.

Et puis, comment ne pas évoquer l’un des pires jeux de mots dans toute sa filmographie, avec son film Une femme est une femme (1961) ? La dernière réplique d’Anna Karina m’a donné beaucoup de mal. Jean Claude Brialy et Anna Karina sont ensemble au lit, il lui dit : « Angela, tu es infâme », elle lui répond : « Moi ? Je ne suis pas infâme, je suis une femme ». J’ai trouvé l’équivalent en anglais avec : il lui dit « Damn you, Angela ! » Elle réplique : « No, a dame me ».

J’étais seul à faire ce travail, à l’occasion de la ressortie du film en Amérique. C’était au studio Malakoff ; je me souviens que la sœur de Jean-Luc Godard était présente au labo lorsque j’ai fait cette dernière phrase, je lui avais demandé de venir, car j’avais des problèmes de traduction. Bien plus tard, Anne-Marie Miéville, avec qui j’ai eu l’occasion de travailler sur ses films, me recommande à nouveau pour travailler avec lui sur Éloge de l’amour.

Avec ma collègue Cynthia Schoch, nous avons traduit ce film, c’est un objet très curieux. Ça s’est passé parfaitement bien. Il nous avait invités à découvrir le film chez lui en Suisse. Je me souviens, j’étais un peu grincheux, je ne voulais pas me déplacer aussi loin pour un travail que je ferais de toute façon en région parisienne. On a tout de même pris le train jusqu’à Lausanne, et ensuite un bus pour Rolle. Il nous a vraiment bien reçus, il était très sympathique, comme Anne-Marie Miéville. C’était une expérience assez drôle. Le lendemain de la première à Cannes en mai 2001, il m’a appelé pour me dire combien il était content des sous-titres. J’aurais dû, je pense, arrêter là, car après ce fut un peu plus compliqué. Avec Notre musique, tout devenait un peu plus complexe, il y avait plusieurs langues à traduire. Mais surtout, il ne voulait pas que tout soit traduit.

Mais qui sont les petits nouveaux ?

En 2024, le Conseil d'Administration de l'ATAA s'est étoffé de cinq nouveaux membres. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs motivations ? Vous voulez tout savoir sur eux ? Alors c'est parti !

Et le mot de la fin pour Clément Martin, traducteur de jeux vidéo !

L'ATAA est une structure qui a à cœur le bien-être de ses adhérents, et dans laquelle, si on y met le temps nécessaire, on peut, à sa mesure, faire évoluer les choses dans le bon sens. Et en plus rencontrer des gens super et boire des coups. Que demande le peuple ?
  • Depuis combien de temps travailles-tu dans le domaine de la traduction ou de l'adaptation audiovisuelle ?

Mon tout premier (et seul à ce jour) contrat en audiovisuel remonte à avril 2020 (pour m’occuper pendant le confinement, c’était super) : c’était de la voix-off pour un documentaire, je n’y connaissais rien et j’ai fait de mon mieux. J’ai été payé, j’imagine que ça veut dire que le client était content.

Sinon, je traduis à temps plein depuis septembre 2021, et je ne fais plus trop d’audiovisuel à part pour le jeu vidéo, qui est ma deuxième casquette principale (une image mentale toujours délicieuse, les casquettes multiples).

  • Quel aspect de ce métier te passionne le plus ?

Dans The Wire (la meilleure série du monde, cherchez pas j’ai raison), il y a un personnage de journaliste qui dit qu’il est trop simple pour vouloir des prix, il veut juste voir quelque chose de nouveau tous les jours, et écrire un papier là-dessus.

C’est pour ça que j’aime la traduction : découvrir des choses nouvelles tous les jours, et devoir faire preuve de créativité pour les faire passer dans la langue cible. Ça, et le fait de travailler sous contraintes, nombreuses quand on fait du jeu vidéo (nombre de caractère, contexte réduit, question de genre, etc.)

Mais qui sont-ils ?

C'est vrai, ça, qui sont ces huit membres qui composent le conseil d'administration de l'ATAA en 2023 ?

Afin de remettre les individus au centre de l'histoire, nous avons eu l'idée de ces portraits. Peut-être qu'en nous découvrant plus avant, vous ressentirez la grande envie de nous rejoindre au CA lors du prochain exercice qui commencera en 2024 !

Et pour le dernier portrait, mais pas des moindres, voici notre trésorière de choc, Simona Florescu.

Même avec de petites actions, on participe aux progrès de l'association, et voir notre effort collectif porter ses fruits, c'est aussi une leçon d'endurance et de persévérance au quotidien.
  • Quelle est la plus grande satisfaction que tu retires de ton travail de traductrice adaptatrice ?

Je crois que c'est à la fois le fait d'enrichir et d'approfondir mes connaissances dans tout un tas de domaines par les nombreux documentaires sur lesquels j'ai eu la chance de travailler, et la joie de faire rayonner la culture roumaine et ses œuvres cinématographiques en France. Ayant quitté la Roumanie à 4 ans, j'ai été un peu coupée de son histoire et de sa culture, mais je suis très émue de pouvoir aujourd'hui les redécouvrir et les partager avec les Français à travers les magnifiques documentaires se penchant aussi bien sur la faune et la flore que sur les traditions et coutumes ancestrales de certaines de ses régions encore méconnues.

Portraits de traducteurs : Elisabeth Fuchs

Suite de notre série de portraits de traducteurs, membres de l’ATAA.
La parole est à Elisabeth Fuchs !

Nom : Fuchs
Prénom : Elisabeth
En exercice depuis : 2006 (en traduction audiovisuelle depuis 2015)

Portraits de traducteurs : Délia D’Ammassa

Suite de notre série de portraits de traducteurs, membres de l’ATAA.
La parole est à Délia D’Ammassa !

Nom : D’Ammassa
Prénom : Délia
En exercice depuis : 1999

Ton parcours

Après des études d’anglais à Paris et cinq ans passés en Irlande, où j’ai étudié puis travaillé dans plusieurs domaines, comme la restauration, l’interprétation, l’enseignement et le tourisme, je suis revenue en France avec l’idée de compléter ma maîtrise d’un « DESS », le Master 2 actuel.

J’ai été acceptée au concours d’entrée du DESS de traduction et adaptation cinématographique de Lille, en 1998-1999. À la fin de l’année, la fac a organisé un stage collectif d’une semaine chez Dune MK. Ensuite, j’ai eu la chance d’être appelée par le laboratoire VDM, à Courbevoie, dès le début de l’été 99 pour un CDI dans leur tout nouveau service de sous-titrage, qui ne comptait qu’un seul traducteur, à l’époque. Il m’a formée, puis je l’ai remplacé pendant ses premières vacances et ensuite, on a travaillé à deux puis très rapidement à trois pendant plusieurs années. Mais les plans sociaux se sont succédé et j’ai fini par faire partie de la dernière vague de licenciements massifs avant la restructuration et le déménagement de VDM à Issy-les-Moulineaux en 2005. Depuis ce temps-là, j’exerce en free-lance.

Portraits de traducteurs : Maï Boiron

Suite de notre série de portraits de traducteurs, membres de l’ATAA.
La parole est à Maï Boiron !

Nom : Boiron

Prénom : Maï
En exercice depuis : 1994 chez Titra – 2001 en adaptation freelance

Ton parcours

1988-1992 : licence de LEA à Nanterre

1992-1993 : une année à l’Université de San Francisco, département cinéma.
1994 : engagée en CDI chez Titra Film grâce à George Dutter.
2001 : temps partiel chez Titra – début de mon activité d’adaptatrice de sous-titres
Fin 2013 : démission de Titra
2014 : début de mon activité d’adaptatrice de doublage

Portraits de traducteurs : Amandine Joyaux

Suite de notre série de portraits de traducteurs, membres de l’ATAA.

La parole est à Amandine Joyaux !

Nom : Joyaux

Prénom : Amandine
En exercice depuis : 2009

Ton parcours

Après avoir fait la formation de Lille 3, je me suis retrouvée sur le marché du travail en 2008 avec le désir de travailler dans le doublage et j’ai commencé par faire un stage en production chez Dubbing Brothers. Cette expérience n’ayant pas été concluante, je me suis tournée vers la voice over en janvier 2009. En septembre 2009, j’ai été contactée par la société Audiophase pour laquelle j’ai doublé deux séries et quelques téléfilms, puis, en mars 2010, j’ai commencé à travailler chez Mediadub. Depuis, j’écris trois séries pour eux et je continue parallèlement à travailler chez Nice Fellow, de temps en temps pour Audiophase (mais leurs tarifs n’encouragent pas vraiment une collaboration régulière…) ainsi que Deluxe Productions depuis peu.

Portraits de traducteurs : Virginie Bagot-Day

Pour mettre en lumière nos métiers de l’ombre, nous inaugurons aujourd’hui un nouveau rendez-vous sur le blog : les portraits de traducteurs, membres de l’Ataa. La première à s’être prêtée à l’exercice est Virginie Bagot-Day, qu’elle en soit remerciée !

Nom : Bagot-Day
Prénom : Virginie
En exercice depuis : 1994

Ton parcours

J’ai débuté dans le sous-titrage en passant par la case repérage-simulation dans un gros labo. J’y suis restée 3 ans pour ensuite me lancer.