Journaljanvier 2025

Vie de l'ATAA
16/01Assemblée générale à 19h à la SCAM

Y a pas d'art dans l'IA

Une réflexion autour de l'IA et de son intrusion dans le monde de l'art

Bon, faut qu’on parle d’un truc que vous connaissez tous : l’IAG (Intelligence artificielle générative). C’est un terme un peu trompeur, utilisé pour qualifier un programme statistique qui engloutit un nombre incalculable de données qu’il a pillées un peu partout pour recracher une espèce de somme moyenne – voire approximative – de toutes ces données.

En fait, quand on parle d’IA en général, je trouve ça hyper pratique. Ça permet de faciliter le tri de certains logiciels, d’accélérer le traitement de données, de me donner une recette basée sur les aliments dans mon frigo, d’accélérer la manière qu’on a de travailler, de sortir des lignes de codes en quelques secondes pour créer des programmes de base sans rien y connaître en programmation : bref, ça peut être un superbe allié.

Mais – car oui, il y a un mais – je m’interroge sur l’utilité de cette fameuse IA dans le domaine de l’art. Et OK, c’est bluffant, on parvient à créer des images, des vidéos, de la musique, même à sortir des scénarios de ces programmes. On pourrait s’interroger sur la qualité de ces productions, mais ça n’est pas exactement l’objet de ma réflexion.

La question que je me pose c’est : pourquoi ?

Pourquoi je m’intéresserais à de l’art qui n’a pas été créé par un humain ? Pourquoi j’utiliserais mon temps de cerveau disponible pour regarder ou écouter quelque chose qui n’a pas été pensé par un être sensible ? Qui n’a jamais eu aucune expérience du monde physique ? Qui n’a pas souffert pour créer, qui n’a rien mis de lui-même dans son « œuvre » ?

Rencontre avec Lola Wagner

Mention spéciale du Prix de la traduction de documentaires audiovisuels

Lors de la remise de votre récompense, vous êtes montée sur scène en clamant un tonitruant « Je ne suis pas qu’un physique ! » qui a enthousiasmé l’assistance. Quelle place prend l’humour dans votre vie ?

L’humour est mon principal trait de personnalité. Avec l’autodérision. Même dans les situations dramatiques, le rire me sert de rempart. J’aime que la vie soit drôle. Et je ne m’entoure que de gens dotés d’un grand sens de l’humour.

Préférez-vous les programmes légers aux sujets sérieux ?

J’aime traduire des programmes drôles pour pouvoir y mettre ma patte. Quand le narrateur d’une VO tente une blague totalement intraduisible, je fais le choix de placer un trait d’humour un peu plus loin dans le texte, afin de ne pas perdre le caractère humoristique du programme. Évidemment, ce sont des choix artistiques et subjectifs. Nous savons bien que « traduire, c’est trahir ». Il faut toujours trouver le bon équilibre. Cependant, les DA ou les relecteurs ont parfois tendance à me censurer : « Attention ! Ce n’est pas ce qui est dit dans la version originale. Il faut respecter le sens littéral. » Les labos craignent aussi la critique des chaînes qui préfèrent généralement une approche conventionnelle, quitte à s’éloigner du ton de la VO. Cependant, certains de mes clients ont compris mon humour et ma manière de travailler.

Parlez-nous de Food Factory, la série documentaire pour laquelle vous avez reçu une mention spéciale de la part du jury ATAA.

J’ai traduit une dizaine d’épisodes de Food Factory. On me l’avait vendue comme une série de petits 22 minutes faciles à adapter, pourtant ce programme n’a rien d’évident. Le débit de paroles est très rapide et chaque épisode m’a demandé une semaine de travail. Au début, j’ai passé un temps considérable sur des sites de vente ou sur des catalogues en ligne à rechercher des références de machines chinoises, et à identifier quelle petite pièce convient à quel moteur. Mais j’aime ce travail d’enquête.

Rencontre avec Isabelle Brulant

Lauréate du Prix de la traduction de documentaires audiovisuels 2024

Félicitations pour votre prix ATAA !

Si vous ne l’aviez pas remporté, comment auriez-vous réagi ?

Si je n’avais pas gagné le prix, j’aurais applaudi poliment [rires]. J’aurais évidemment été déçue mais pas surprise, car je ne m’attendais pas à gagner. Avec des thématiques ultrapointues sur le monde de la boxe ou l’univers de la haute couture, je n’imaginais pas rivaliser avec les autres finalistes [respectivement Stanislas Raguenet & Cristina Fernandez et Isabelle Sassier, ndlr]. Je pensais même que Lola [Wagner] aurait remporté le prix, car Food Factory s’avère un programme compliqué. Je trouve positif qu’un épisode de téléréalité ait remporté une mention spéciale – comme Delphine Piquet en 2019 avec une série sur le quotidien d’une équipe de mécaniciens – car c’est représentatif d’une réalité de notre métier. Cette récompense démontre qu’il ne faut pas confondre la thématique d’un documentaire avec la difficulté de traduction et la qualité du travail de l’adaptateur. Notre secteur d’activité valorise peu la téléréalité car c’est un genre populaire, au contenu pas toujours intéressant. Pourtant, ces programmes très bavards peuvent nécessiter beaucoup de recherches et s’avérer très complexes à adapter. À l’inverse, un très beau documentaire animalier passera pour un programme prestige. Alors même qu’il s’agira d’une narration dotée de peu de mots, de quelques jolies phrases ponctuées de nombreux silences, et ne nécessitant que peu de recherches…

Cette échelle de valeur dans les programmes s’observe également au sein des professionnels de la traduction. Ceux qui font de la voice over sont dépréciés. Le doublage se situe tout en haut de la pyramide, au-dessus du sous-titrage, tandis que la voice over, perçue comme le travail d’adaptation le plus facile, est reléguée tout en bas de cette hiérarchie. Beaucoup dans le métier – DA, chargés de projets dans les labos, etc – refusent même les projets en voice over… Selon moi, il serait nécessaire d’entreprendre une revalorisation du documentaire. Par chance, Netflix a un peu changé la donne en nourrissant son catalogue de non-fiction. Précédemment, il n’y avait qu’Arte à s’illustrer véritablement dans ce domaine.

Lola Wagner (mention spéciale) et Isabelle Brulant

Journaldécembre 2024

Relations avec les clients
20/12Atelier voice over Netflix
Vie de l'ATAA
17/12Réunion du conseil d'administration
Associations soeurs
16/12Réunion AVTE
Institutions
13/12Participation au GIT
Institutions
10/12Conseil d'administration de la SSAA
Associations soeurs
09/12Réunion AVTE
Institutions
06/12Rendez-vous avec le CNC et les organisations du groupe pour une création humaine
Institutions
05/12Réunion avec le SNAC concernant la SSAA
Associations soeurs
03/1211h30 rassemblement doublage 19h assemblée générale intersyndicale doublage
Associations soeurs
02/12Réunion intersyndicale

Prix de la traduction de documentaires audiovisuels 2024 : bravo à Isabelle Brulant et Lola Wagner !

Jeudi 14 novembre 2024, Madeleine Lombard, Marion Riches et Adrienne Golzio du comité d’organisation du Prix de la traduction de documentaires audiovisuels ont accueilli 100 invités dans l’auditorium Charles Brabant de la Scam. Rassemblé pour la cérémonie de remise du Prix, ce public a assisté au sacre d’Isabelle Brulant qui a remporté le trophée, et de Lola Wagner récompensée d’une mention spéciale.

C’est avec un plaisir non dissimulé que Rémi Lainé, président du conseil d’administration de la Scam – où siège notre représentante Valérie Julia –, et Hervé Rony, directeur général de la Scam, ont accueilli la 7e édition de la cérémonie de remise du prix de la traduction de documentaires de l’ATAA. Après un an de travaux, le magnifique hôtel particulier offre de nouveaux espaces de travail, dont des studios Image & Son, accessibles gratuitement aux adhérents de la Scam. Chacun est invité à se les approprier. D’autant que Rémi Lainé et Hervé Rony n’ont pas non plus caché leur attachement aux traducteurs de l’audiovisuel dont ils reconnaissent l’apport au métier. En effet, rien n’est-il plus éloigné d’une adaptation professionnelle qu’une traduction DeepL ? Consciente que notre profession est mise à mal, la Scam se bat chaque jour pour négocier des accords. La mobilisation est complète concernant l’intelligence artificielle pour laquelle des possibilités d’encadrement sont à l’étude. Avec un répertoire particulièrement cohérent, la Scam sait qu’elle pèse dans les négociations, de même que les traducteurs dont le poids est réel. Et s’il fallait une autre preuve d’appartenance des traducteurs à la grande famille de la Scam, Rémi Lainé et Hervé Rony ont officiellement annoncé qu’une enveloppe de soutien institutionnel d’un montant de 10 000 euros venait d’être attribuée à l’ATAA.

Hervé Rony, directeur général de la Scam, et Rémi Lainé, président

Mais qui sont les petits nouveaux ?

En 2024, le Conseil d'Administration de l'ATAA s'est étoffé de cinq nouveaux membres. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs motivations ? Vous voulez tout savoir sur eux ? Alors c'est parti !

Et le mot de la fin pour Clément Martin, traducteur de jeux vidéo !

L'ATAA est une structure qui a à cœur le bien-être de ses adhérents, et dans laquelle, si on y met le temps nécessaire, on peut, à sa mesure, faire évoluer les choses dans le bon sens. Et en plus rencontrer des gens super et boire des coups. Que demande le peuple ?
  • Depuis combien de temps travailles-tu dans le domaine de la traduction ou de l'adaptation audiovisuelle ?

Mon tout premier (et seul à ce jour) contrat en audiovisuel remonte à avril 2020 (pour m’occuper pendant le confinement, c’était super) : c’était de la voix-off pour un documentaire, je n’y connaissais rien et j’ai fait de mon mieux. J’ai été payé, j’imagine que ça veut dire que le client était content.

Sinon, je traduis à temps plein depuis septembre 2021, et je ne fais plus trop d’audiovisuel à part pour le jeu vidéo, qui est ma deuxième casquette principale (une image mentale toujours délicieuse, les casquettes multiples).

  • Quel aspect de ce métier te passionne le plus ?

Dans The Wire (la meilleure série du monde, cherchez pas j’ai raison), il y a un personnage de journaliste qui dit qu’il est trop simple pour vouloir des prix, il veut juste voir quelque chose de nouveau tous les jours, et écrire un papier là-dessus.

C’est pour ça que j’aime la traduction : découvrir des choses nouvelles tous les jours, et devoir faire preuve de créativité pour les faire passer dans la langue cible. Ça, et le fait de travailler sous contraintes, nombreuses quand on fait du jeu vidéo (nombre de caractère, contexte réduit, question de genre, etc.)

Journalnovembre 2024

Associations soeurs
25/11Réunion inter organisations autour des stratégies anti IAG
Institutions
25/11Rendez-vous avec le ministère de la Culture au sujet de la SSAA
Relations avec les clients
21/11Réunion périodique avec Netflix
Associations soeurs
21/11Réunion ATESS, ATLF, ATLAS, ATAA
Vie de l'ATAA
14/11Réunion du conseil d'administration
Prix ATAA
14/11Remise du Prix ATAA de l'adaptation d'un documentaire audiovisuel en partenariat avec et à la SCAM
International
06/11Participation avec l'AVTE au Translating Europe Forum à Burxelles

Dysfonctionnements et déni de démocratie à la Sécurité sociale des artistes-auteurs

Membre du conseil d'administration de la sécurité sociale des artistes-auteurs (SSAA), l'ATAA est signataire, avec d'autres organisations, d'une lettre ouverte aux ministères de la Culture et de la Santé, ses deux ministères de tutelle, afin de dénoncer le dysfonctionnement de cette organisation censée exercer des missions de service public, gérer le régime social des artistes-auteurs et assurer plusieurs missions au service des artistes-auteurs.

IAG et droit d'auteur, l'opt-out et l'opt-in

On n’est pas forcément OK quand on est in, ni KO quand on est out, l'ATAA vous explique.

L’opt-out, c’est ce qui s’applique aujourd’hui en matière de droit d’auteur et d’IAG. C’est le Droit d’opposition personnel (dispositif défini aux articles L211-3 8°, L122-5 III et R122-28 du Code de la propriété intellectuelle) à l’utilisation de nos travaux pour le développement ou l’entraînement d’outils d’IAG. Pour faire simple, tant que je n’ai pas refusé expressément qu’on utilise mon travail, tant que je n’ai pas usé de mon opt-out, je suis réputé avoir accepté. Qui ne dit mot consent, quoi. Oui, ça fait mal. Mais on peut “dire mot”. Ce que la SACEM et la SCAM ont d’ailleurs déjà fait. Ces deux organismes ont fait valoir leur opt-out, leur droit d’opposition, pour les œuvres déposées dans leurs répertoires. Vous pouvez, en plus de la protection offerte par ces deux OGC aux œuvres que vous déposez auprès d’eux, faire figurer une mention toute simple au bas de tout courrier transmis à vos clients et de vos notes de droits d’auteur (l’ATAA a mis à jour son modèle en ce sens).

Mais on pourrait aller encore plus loin si l’opt-in était loi. Car à l’inverse du fonctionnement actuel, si le principe d’opt-in s’appliquait, nos travaux seraient protégés par défaut (oui, vous avez bien lu, sans qu’on n’ait rien à faire) contre l’utilisation pour le développement ou l’entraînement d’IAG. Tant qu’on n’aurait pas accepté expressément cette utilisation, on serait réputé l’avoir refusée. Vous l’aurez compris (enfin, on l’espère…), il nous semble essentiel de défendre à la fois une application de l’opt-out et une modification de la réglementation pour basculer vers le principe de l’opt-in.

IAG et traduction - la post-édition

Attention, danger !

Les machines, ces outils initialement conçus pour faciliter nos travaux divers, vous connaissez ? On prédit depuis déjà longtemps qu'elles vont nous remplacer, entretenant une vaste supercherie. Leurs plus fervents défenseurs reconnaissent pourtant l'imperfection des productions issues de machines. Et l’ATAA, comme ses adhérents, reçoit de plus en plus souvent des questions et des propositions autour de la post-édition. Si vous ne savez pas bien ce que c’est, c’est normal, car ce terme est l’exemple même d’une mauvaise traduction.

Issue de l’anglais “post-edit”, cette pratique consiste à retravailler une sortie machine pour que le texte ainsi transposé (on ne peut plus vraiment parler ici ni de traduction ni d’adaptation) d’une langue à une autre retrouve la forme et les caractéristiques d’une traduction ou d’une adaptation réalisée par un humain. Cette pratique, fondée sur une vision chimérique et statistique de la traduction (un mot ou un groupe de mots en langue A = un mot ou un groupe de mots en langue B), emporte plusieurs risques majeurs.

La multiplication de textes et documents issus de machines et plus ou moins améliorés par des humains mène (déjà !) à une standardisation et à un appauvrissement de nos langues et de nos pensées.

IAG et traduction

Ce que nous devons aux Babyloniens, à Alan Turing et à leurs successeurs

Voilà bien longtemps que l'homme a intégré l'existence de différentes langues non comme un progrès, une richesse culturelle, comme le fruit des évolutions de ses pensées, comme l'expression de ses adaptions à des contextes naturels, historiques, politiques ou sociaux divers, mais plutôt comme une punition mythique, un obstacle à surmonter pour faciliter, voire libérer, les échanges humains de toutes natures.

Voilà donc bien longtemps aussi qu'il tente par différents moyens de vaincre cet obstacle, de contourner cette punition.

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, la défense des libertés passait par l'interception et le décodage de messages secrets. Ces messages étaient codés pour n'être lisibles par leur destinataire qu'après un décryptage, au moyen d'un système de codage connu de lui et de l'émetteur du message. De là, entre autres, est née la supercherie, le mirage d'une possibilité de traduction automatique fondée sur l'idée qu'une langue serait un code, et que passer d'une langue à une autre reviendrait finalement à transposer un message d'un code à un autre.

Les premiers modèles de traduction automatique ont ainsi été développés à partir de listes de mots, complétées de règles syntaxiques, grammaticales et linguistiques pour chaque langue des combinaisons recherchées. L'ajout de ces règles permettait, avec un travail d'arborescence, d'améliorer les résultats de transcodage pour imiter un message rédigé directement dans la langue cible.

Puis les chercheurs commencèrent à envisager, en s'inspirant de la biologie, l'idée que les machines puissent, à partir de ces données, "apprendre" par elles-mêmes comment traduire en développant des réseaux dit neuronaux, c'est-à-dire supposément inspirés de la structure neurone du cerveau humain. Pour faire fonctionner ces réseaux, la machine doit en premier lieu comparer d'immenses corpus de textes disponibles dans deux langues. À partir de cette étude, elle crée une représentation spatiale de chaque langue, un modèle d'organisation linguistique, établi, pour chaque combinaison de langue source et de langue cible, sur la base d'occurrences et de proximités récurrentes de mots ou groupes de mots les uns par rapport aux autres. Le résultat du transcodage est ici obtenu à partir d'un calcul statistique, de probabilité, en somme.